lundi 27 janvier 2020

Rencontre avec Vincent Delavenne, Vice-président Coty luxury packaging.

Rencontre avec Vincent Delavenne, Vice-président Coty luxury packaging.
Chez Coty, nous souhaitons relever tous les nouveaux défis qui sont liés au plastique. Et ces nouveaux défis sont d’abord dans le domaine de la sustainability. Nous sommes en train de redécouvrir les codes de valeur du luxe, avec l’intégration du renouvelable, du recyclable, de rechargeable, en les rendant désirable par nos consommateurs.

Avant de répondre à vos questions, permettez-moi de me présenter. Mon nom est Vincent Delavenne, Vice-président Coty luxury packaging. J’ai une expérience de 25 ans dans le packaging, principalement de luxe. J’ai travaillé pour différentes maisons (Shiseido, Bulgari, Oriflame, Dior, Unilever), dans différents pays (France, Suisse, Belgique, Chine), et pour les catégories parfums, maquillage, et skincare. Chez Coty, 9 milliards d’euros de chiffre d’affaires dans la beauté, je suis en charge, avec mon équipe, du développement packaging des marques Boss, Calvin Klein, Gucci, Tiffany, Burberry, Marc Jacobs, Lancaster, Philosophy, Mexx, Bruno Banani, et d’autres marques.

Quelles sont vos nouvelles attentes vis-à-vis des produits et emballages en plastique ?

Mes attentes vis-à-vis des pièces, produits et emballage en plastique sont multiples et diverses. Ils doivent remplir d’abord les fonctions essentielles d’un emballage : fonction de protection du produit, fonction de distribution de celui-ci, et ensuite fonction de design/beauté et d’information du consommateur. Tout cela en permettant la logistique du transport du produit du point de remplissage (l’usine) jusqu’au consommateur final, qui peut être partout dans le monde.

Il y a 70 ans, il n’y avait pas de plastique, et on n’avait que des bouteilles en verre, en métal, consigné ou non, mais on n’avait surtout, surtout, beaucoup plus de produits secs et peu de produits liquides. Tout cela a changé avec l’utilisation du plastique. Avec une fine barrière de plastique, les packagers ont augmenté par 10 le temps de conservation de la viande avec les barquettes, et votre eau potable en bouteille peut être conservé pendant presque 2 ans ! C’est la même chose pour la beauté. Nous utilisons du plastique pour avoir des tubes souples, des capots qui s’ouvrent facilement sans ouvre-boite, nous avons besoin de pompes en plastique pour nos parfums, et bien évidemment de garantir l’étanchéité de nos produits. Les emballages plastiques ont permis à l’industrie de la beauté de multiplier l’offre et répondre à de nouveaux besoins, toute en la rendant accessible au plus grand nombre. Mes attentes pour les emballages en plastique sont d’abord de remplir les fonctions de base d’un packaging : protection, utilisation, design et information, et logistique. Mais il est évident aussi qu’il y a le coût de la matière, sa disponibilité, et, de façon évidente, l’aspect environnement. Cette fonction est désormais intégrée aux fonctions de base que doivent apporter les emballages.

Cela m’amène à votre deuxième question : mes nouveaux produits/packaging ont-ils de nouvelles caractéristiques, comme de nouveaux matériaux, des matériaux recyclés ? Ma réponse est oui. Tous les plastiques sont en pleine restructuration et tous les équilibres connus sont en train de changer. Il n’y a qu’à voir l’engouement pour la new plastic economy, créée par la fondation Ellen McArthur, dont Coty est membre, pour comprendre le changement systémique en cours. Pour commencer, le plastique ne viendra plus exclusivement du pétrole, car d’autres sources sont en train d’émerger (source renouvelable venant de différentes cultures), mais surtout, surtout, du plastique en lui-même, du plastique déjà produit. C’est ce que nous préconisons pour nos marques.  C’est la grande nouvelle source, et cette « nouvelle » matière vient de nos poubelles, notre nouvelle mine d’or. Des petites start-up sont en train de développer des procédés révolutionnaires pour reproduire du plastique à partir de… plastique !  De PET, PE, PP, on est en train de passer à du R-PET, R-PE, et R-PP (R comme recyclé). C’est une révolution pour toute notre chaine de valeurs, dans tous ces aspects : disponibilité des matières, leur transformation dans la qualité requise, la recherche de la transparence, et aussi dans les nouvelles perceptions de nos consommateurs. Les tests consommateurs vont redevenir clé, car les attributs qui définissent la qualité, ou le luxe, sont en train de changer très vite, partout dans le monde, et pour complexifier les choses, à un rythme différent sur les différents continents. Nous sommes en train de redécouvrir les codes de valeur du luxe, avec l’intégration du renouvelable, du recyclable, de rechargeable, en les rendant désirable par nos consommateurs.

Pour votre dernière question « Comment Coty relève les nouveaux défis liés au plastique ? », chez Coty, nous souhaitons relever tous les nouveaux défis qui sont liés au plastique. Et ces nouveaux défis sont d’abord dans le domaine de la sustainability. Les informations sur ce sujet ont des origines multiples, sur les matériaux, sur les nouvelles solutions, et nous désirons anticiper aux mieux les demandes de nos consommateurs, avec nos fashion house. Les demandes sont d’ailleurs générales et nous viennent de tous les niveaux, et cela est sain. Nous avons donc lancé chez Coty trois voies pour une nouvelle utilisation des matières plastiques. Notre première voie est de mettre en pratique des solutions déjà existantes et déjà disponibles, sur certains projets, comme des flacons avec du plastique recyclé (R-PET) pour nos lignes de bain de parfum. Notre deuxième pilier, que nous avons déjà intégré au niveau du service packaging, est un changement dans notre approche pour développer un nouveau projet et nous intégrons l’aspect environnemental dès le départ. Et, pour le mettre en pratique, nous construisons un index sustainability pour chaque projet, avec un impératif : faire-mieux-qu’avant ! Cet index est revu à chaque phase du développement d’un projet, et le groupe Coty n’a qu’un objectif : l’amélioration de cet index, le plus vite possible ! Mais pour influencer sur les choix des projets, il faut savoir de quoi l’on parle ! et n’avoir aucun a priori ! Notre troisième pilier s’appuie sur un programme « back-to-school » / « retour à l’école » sur la sustainability. Nous avons lancé un programme de 20h de formation pour les packagers, avec une université de Hollande, fait par des professeurs d’université de haut niveau, pour repartir sur des bases solides, et se remettre tous à niveau, d’abord et surtout pour le vocabulaire et les définitions.

Grâce à tout cela, nous pourrons mieux répondre à tous les défis qui arrivent. Nous n’en sommes qu’au début, et toute la filière plastique, du producteur à l’utilisateur final, et qui continue à travers nos emballages plastiques utilisés, est en train de se réinventer. A nous de réinventer le monde dans lequel nous voulons vivre.

Merci.

Vincent Delavenne

16 décembre 2019.